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Jour 34 - Mercredi 15 Août - Part V

Pripiat 2/2

Notre prochaine visite est un lieu à la fois très connu et potentiellement très dangereux, l'Hôpital. Serj nous parle de Vladimir Pravik, lieutenant des pompiers présent sur les lieux dès le début et fait héros de l'Union soviétique depuis 1987 (A titre postume). C'est vers l'hôpital de Pripiat que seront évacués dans un premier temps les pompiers pendant la période de latence de la maladie des rayons. Très vite leur état se dégrade, à commencer par leur peau qui noirci à cause des rayonnements ionisants. Ils seront tous, plus tard, envoyés vers l'hôpital numéro 6 de Moscou où la plupart d'entre eux mourront d'une manière atroce, les radiations les consumant de l'intérieur. On pourrait presque dire qu'ils se sont décomposés vivant. Aucun des pompiers de l'équipe de Pravik n'a survécu. La dose exacte qu'ils ont reçue reste inconnue, entre 500 et 2 000 röntgen, probablement. Ils ont été enterrés à Moscou dans un cercueil entouré de plastique puis dans un caveau métallique. Ces mesures ont été prises car au moment de leur décès, la radioactivité de leur corps était comparable aux déchets très radioactifs produits par l'industrie nucléaire.

Le lieu le plus dangereux de l'hôpital est sans conteste le sous sol. Le simple fait de faire mine de s'engager dans l'escalier fait bondir le compteur Geiger. En bas se trouve toujours les vêtements des pompiers entre autres objets très fortement contaminé. Et Serj nous dit que des inconscients descendent y faire des photos... Nous on préfère monter un peu dans les étages et aller vers la zone pédiatrie.

Je vous cache pas que la visite de l'hôpital est particulièrement glauque... On est assez content de retrouver le soleil après ça. Pas très loin de l'hopital se trouve un étonnant bâtiment, une halte nautique au bord d'un lac, le Pripiat Café. Le site est ravagé, mais nous arrivons cependant à bien nous situer dans cet espace. Le restaurant avec ses fresques colorées en verre, la rambarde menant au ponton en béton. La vie au bord du lac devaient être joyeuse pour ces familles, jeunes et plutôt aisées.

La place Principale de Pripiat, majestueusement grande, regroupe plusieurs bâtiments dont le grand hôtel de la ville et le Palais de la Culture relié à l'hôtel par un passage couvert.

Non loin de la place principale de Pripiat se trouve une autre place, celle où se trouve la fameuse grande roue jaune de la ville. Le destin est parfois farceur. Ni la grande roue, ni les autos tamponneuse ni aucun autre manège n'a jamais fonctionné car ce parc d'attraction devait être inauguré pour les fêtes du 1er mai... Il s'en sera fallu de quelques jours... Paradoxalement c'est un lieux très pollué, Serj nous a mis en garde alors qu'on regardait des gens grimper dans la nacelle la plus basse. Autre anecdote passablement effrayante, le moteur de la grande roue a été volé, sans doute pour remplacer un moteur de grande roue en panne dans une autre ville d'Ukraine !!!

La place centrale et la place de la grande roue sont séparées par le palais de la culture où nous allons faire un tour. Comme tout palais de la culture soviétique, le bâtiment comprend à la fois bibliothèque, salle de théatre et de cinéma ou salle de conférence mais aussi plusieurs installations sportives, le sport étant partie intégrante de la culture en URSS.

De retour sur la place centrale, on jette un dernier regard à l'immeuble le plus luxueux de Pripiat à l'époque, celui où étaient logés les cadres du partis ainsi que les cadres dirigeants de la centrale. Pas le temps d'aller y faire un tour. On réalise qu'on manque de temps et qu'on devra revenir une autre fois, sans doute en hiver pour voir ça avec de la neige...

L'usine Jupiter fabriquait officiellement les lecteurs de cassettes audios mais une installation secrète en sous sol produisait des composants militaires et il y avait aussi un laboratoire de tests. Pendant 10 ans après la catastrophe, le laboratoire souterrain a servi à tester du matériel de détection et des techniques de décontamination. On y avait amené pour ça pas mal de débris hautements radioactifs qui sont toujours là, ce qui en fait le lieu le plus dangereux de la ville.

Plus loin, nous passons devant ce qui était autrefois le grand stade, les gradins sont toujours bien là. Inauguré en 1979, le stade Avanhard était le terrain de jeu du FC Stroitel Prypiat.

Traditionellement on termine la visite de Pripiat par la traversée de la forêt rousse (une zone de foret où l'on ne s'arrete pas car le taux de radiation est très fort. C'est la partie de forêt qui a pris le maximum de retombée avec le vent le soir de l'explosion. Tous les arbres sont mort et ont pris une teinte rousse d'où son nom.). Un peu plus loin il y avait le village de Kopatchi dont il ne reste que la crèche, seul bâtiment en dur du village aujourd'hui rasé et enfoui sous terre.

Voilà, il ne nous reste plus qu'à passer le check point et le test de radioactivité, histoire de s'assurer qu'on va pas être lumineux la nuit venue puis on roule deux heures jusqu'à Kiev. Sacré journée qui me laisse songeur... On a longtemps dit que le nucléaire était sûr et que Tchernobyl était l'exception qui confirmait la règle, et que cette exception s'expliquait par la chute de l'URSS, la vétusté des bâtiments, la culture du secret qui avait empéché les soviétique de demander de l'aide avant et après la castastrophe, voir du niveau médiocre de leurs ingénieurs ou de leur faible maitrise des technologies modernes (En clair les soviétiques étaient des gros cons incultes et bourrés à la vodka du matin au soir, à se demander comment ils avaient pu inquiéter un jour la puissante Amérique...). On disait donc ça et puis un jour, le 11 mars 2011, on a plus rien dit... Les gens sont certes crédules mais qui aurait gobé que les japonnais étaient des gros cons bourrés au saké qui n'y comprenait rien en technologie moderne ?

Je vous met en bonus quelques images de 1985-86...